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(Alain Weidert, Forum, La Croix 19/09/09)
«C ’est le Seigneur lui même qui, par le Concile, presse à nouveau tous les laïcs de s’unir plus intimement à lui de jour en jour, et de prendre à cœur ses intérêts comme leur propre affaire. (…) Les laïcs se montreront ses collaborateurs », a fait valoir Vatican II (1). Pour rendre compte de cette collaboration, il est apparu nécessaire à notre groupe de paroissiens, ayant travaillé cette année sur « l’apostolat des laïcs (2) », d’honorer à l’avenir quatre niveaux d’implication et de responsabilité, emboîtés les uns dans les autres telles des poupées russes.

Le premier de ces niveaux est celui de la collaboration originelle de Jésus aux desseins du Père. Cette collaboration l’a fait Christ et Seigneur. Elle le définit comme unique et définitif prêtre, grand sacerdote (en grec : archi-hiéreus). Le Christ, un autre prêtre, médiateur et non intermédiaire. Jésus sonne

le glas des spécialistes sacrés qui, hors du commun des mortels, servent de navette entre ciel et terre. Dans la réalité humaine de Jésus se réalise l’échange sacerdotal et christique de compénétration et de réciprocité de l’humain et du divin. En lui se réalise la médiation elle-même, se manifeste le royaume, dit aussi Vatican II (cf. constitution dogmatique Lumen gentium sur l’Église, n. 5).

Le deuxième niveau est celui d’une collaboration primordiale à cette collaboration originelle. C’est la collaboration, à l’œuvre et à l’identité du Christ, de la communauté de ses héritiers et de son héritage, le kléros (3). Communauté de femmes et d’hommes qui ont entendu et accepté de devenir peuple sacerdotal, sacerdoce royal de cohabitation et de conjonction de l’humain et du divin. Inouï : l’Homme est invité à être configuré au Christ (cf. LG 7, et décret Ad gentes sur l’activité missionnaire, n. 36). Les croyants osent alors s’aventurer dans des exigences de fraternité effectives, de sanctification au quotidien des relations humaines et des réalités terrestres. Ils cherchent le règne de Dieu à travers la gérance des choses temporelles qu’ils ordonnent selon Dieu (LG 31). Consacrés au Christ, ils consacrent à Dieu le monde lui-même (LG 34). Héritiers du Christ, sa lignée, les chrétiens s’adonnent ensemble à la succession christique, au cœur de l’espace-temps-matière devenu pour eux véritable temple de Dieu.

Le troisième niveau est celui d’une collaboration essentielle. Celle, indispensable, de ministres, qui sont ordonnés à la collaboration primordiale de l’ensemble des baptisés. Ministres « au sein du peuple de Dieu », non « pour être séparés de ce peuple » (décret Presbyterorum ordinis sur le ministère et la vie des prêtres, n. 3), mais appelés à servir le peuple de dieu (LG 28), à servir les croyants dans leur tâche de déploiement du Christ. Ces ministres, presbytres (NDLR : selon le terme grec du Nouveau Testament signifiant « anciens ») et diacres, collaborant ensemble avec l’évêque à la succession apostolique, celle-ci étant elle-même ordonnée à la succession christique, primordiale et première. Ce sacerdoce, qualifié de ministériel, est enveloppé dans le sacerdoce commun des fidèles ; il est alors apprécié comme un vis-àvis de ce dernier. Et il est au service de la collaboration primordiale, devant laquelle aucun baptisé ne devrait pouvoir se défiler.

Le quatrième niveau, enfin, est celui d’une collaboration majeure dans une Église parvenue à maturité. Il s’agit de la collaboration de baptisés s’engageant au côté du ministère des prêtres et des évêques pour les aider dans leur responsabilité. Collaboration sans privilège d’aucune sorte, sans prérogatives comme il se doit pour tout service d’Évangile, avec cependant un juste salaire pour les permanents. « Coopération des fidèles » (LG 23) qui, dans les paroisses et les diocèses, travaillent avec la hiérarchie (AG 21). Pour être avec celle-ci serviteurs de la responsabilité primordiale de tous. Responsables de la vocation qui, instituant les croyants ensemble comme entité vivante du Christ, permet à ces derniers de révéler la configuration de l’Homme au Christ et le corps christique de l’humanité.

Rien, en effet, ne paraît pouvoir être vécu, compris ou fait qui puisse être situé au-dessus, à côté ou en dehors de la « collaboration primordiale » : elle est la plus haute des vocations humaines, puisque participation à la nature, à la dignité et à l’identité même du Christ.

(1) Exhortation finale du décret Apostolicam actuositatem sur l’apostolat des laïcs (n. 33). (2) L’an passé, notre travail avait porté sur la constitution conciliaire Gaudium et spes (lire La Croix des 10-11 mai 2008). (3) C’est-à-dire l’ensemble des croyants héritiers de Dieu, cohéritiers du Christ (Rm 8, 14-17). Ce mot plus tard finira par ne plus désigner que quelques-uns des baptisés, formant le clergé.

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