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Un livre à découvrir :

Fabrice Hadjadj, Comment parler de Dieu ? Anti manuel d’évangélisation, Salvator, 2012

 

(Monique Hébrard, Recension, Site de la Conférence des Baptisés de France)

Le sujet central, comme l’indique le titre, est le parler et la parole.

Comment parler de Dieu ? Parler de Dieu est à l’opposé des « stratégies de communication ». Ce n’a rien à voir non plus avec le discours du fondamentaliste, comme de l’athée, pour qui il suffit de dire Dieu pour que tout soit résolu, « soit pour une promotion mécanique, soit pour un utopique débarras ».

Il ne faut pas pour autant se contenter d’être levain dans la pâte. Le levain enfoui rappelle le talent enfoui de la parabole… et « comme le fondamentalisme provoque la réaction de l’athéisme, l’anonymat des chrétiens, au nom de l’humilité et de la primauté des actes sur les paroles, provoque la réaction de l’agnosticisme. »

Parler de Dieu comporte au moins deux exigences : envers celui dont on parle, et envers celui à qui l’on parle.

On ne peut pas prétendre parler de Dieu sans commencer par savoir à qui on en parle : il n’y a de parole de Dieu que dans l’aujourd’hui et s’adressant à quelqu’un. Suit tout un développement, dans la ligne de Gaudium et Spes, qui rejoint très fort le dernier livre de Jean Vanier1 sur le concile Vatican II : on ne peut pas parler de Dieu sans le mettre au cœur des choses de la vie et des gens, avec une parole « toujours attentive aux créatures, toujours hospitalière, se faisant toujours tabernacle ou cathédrale : chaque être y est reçu dans une amplitude verticale qui en recueille le cœur et l’élève dans la lumière ».

Mais avant de parler de Dieu il convient de commencer par se mettre à l’écoute de la Parole en soi, de la porter comme l’on porte un enfant, de la laisser grandir en soi. « Porter son Nom n’est pas l’asséner, mais plutôt le laisser monter à partir du fond de toute réalité ». Ensuite on pourra « parler ». Le mot « écoute » ouvre la Règle de saint Benoît. « L’obéissance est une dimension essentielle de notre être de parole : obéir c’est écouter ».

La parole est toujours fragile. « Bien parler s’accomplit dans la prière et le chant, c’est-à-dire dans le balbutiement suprême, dans la parole brisée d’indicible, béante d’ineffable, rendant l’esprit… » .

Quand on porte la parole de Dieu cela ne peut jamais être comme une leçon de morale, mais « comme un sourcier qui dégage les aspirations les plus profondes ». « Parler de Dieu est indissociablement aimer celui à qui nous en parlons, parce que c’est réverbérer la parole qui lui donne l’existence ».

« Jésus lui-même ne parle jamais en assénant les choses d’en haut, mais en partageant notre existence ordinaire, avec une autorité simple, pour ménager l’espace d’une rencontre ».

Hadjadj ne le dit pas explicitement, mais on peut déduire de sa pensée que l’Église, à force de mettre Dieu à toutes les sauces en lui faisant interdire la pilule, le préservatif, le PACS, le mariage homo… en fait un repoussoir. Dans les temps difficiles que nous vivons, il faut déployer la Parole d’une manière nouvelle et « ne plus tomber dans un moralisme qui ne vaut plus rien en la circonstance ». « Il faut prêcher l’espérance avant de faire de la morale, annoncer le salut avant de dénoncer le salaud ».

Comme dans tous les livres de Fabrice Hadjadj, le style est éblouissant : jeux de mots, rebonds, musique du verbe. La forme est un régal et le fond un mets divin. Qui de plus apporte une riche contribution à la célébration de l’anniversaire du concile. La lecture de l’ouvrage agit comme un feu purificateur, comme un dénudement progressif des impasses pour arriver à l’Essentiel. La lecture de ce livre est un bain baptismal.

 

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